Si je n’étais pas venu , et que je ne leur eusse pas parlé, ils n’auraient point de péché; mais, maintenant, ils n’ont point d’excuse de leur péché (Jean 15:22).
Le péché par excellence de la nation juive, celui qui mit le comble à la mesure de ses iniquités, ce fut, sans contredit, le rejet de Jésus-Christ comme Messie. La venue du Sauveur avait été clairement annoncée par les prophètes; aussi les vrais Israélites, qui attendaient l’accomplissement des oracles divins, comme Siméon et Anne la prophétesse, n’eurent pas plus tôt contemplé le petit enfant Jésus, qu’ils reconnurent en lui la consolation d’Israël et se réjouirent d’avoir vu le salut de Dieu. Mais parce que Jésus-Christ ne répondit point à l’attente de la génération perverse à laquelle il fut envoyé, parce qu’il ne vint point environné de pompe et revêtu de magnificence, parce qu’il ne fut entouré ni du prestige d’un prince ni des honneurs d’un roi de la terre, les Juifs refusèrent de le recevoir. Il monta comme un rejeton devant lui, et comme une racine qui sort d’une terre sèche; il fut méprisé et on n’en fit aucun cas (Ésaïe 53:2-3). Mais là ne s’arrêta point le péché des Juifs. Non contents de nier le caractère messianique de Jésus, ils lui vouèrent une haine implacable; altérés de son sang, ils le pourchassèrent pendant toute sa vie; et leur malice diabolique ne fut pleinement assouvie que lorsque, assis aux pieds de la croix, ils purent suivre du regard, avec une joie féroce, les dernières convulsions et la lente agonie de leur Messie crucifié. Et bien qu’au-dessus de la croix on lût ces mots remarquables « Jésus de Nazareth, le Roi des Juifs », ils ne voulurent jamais reconnaître comme leur roi le Fils éternel de Dieu; c’est pourquoi aussi ils le crucifièrent, car s’ils l’eussent connu, dit saint Paul, ils n’auraient jamais crucifié le Seigneur de gloire (1 Corinthiens 2:8).
Peut-être vais-je vous surprendre, mes chers auditeurs, en vous disant que le péché des Juifs est journellement répété par les Gentils. Ce que les premiers ont fait une fois, un très grand nombre des seconds le font chaque jour. N’y a-t-il pas, en effet, dans le monde; n’y a-t-il pas, même parmi ceux qui écoutent en cet instant ma voix, une foule d’âmes immortelles, qui oublient, qui méconnaissent le Messie? Peut-être ne prenez-vous pas la peine de le rejeter ouvertement; puisque vous vivez dans ce que l’on appelle un pays chrétien, vous croiriez vous déshonorer en blasphémant son nom. Peut-être même êtes-vous attachés à la saine doctrine, et admettez-vous que Jésus est à la fois Fils de Dieu et fils de Marie; mais c’est là tout. Vous ne tenez aucun compte de ses droits; vous lui refusez l’honneur qui lui est dû; vous semblez le juger indigne de votre confiance. Il n’est point votre Rédempteur; vous ne soupirez point après son second avènement, et vous n’espérez point être sauvé par son sang. Bien plus, comme les Juifs, vous êtes les meurtriers de Christ, car ne savez-vous pas qu’en tant que vous méprisez son Évangile, vous crucifiez de nouveau le Fils de Dieu et le livrez à l’ignominie? Oui, chaque fois que vous entendez la prédication de la parole et que vous la laissez écouler; chaque fois que votre conscience est atteinte et que vous étouffez sa voix; chaque fois que vous tremblez à l’ouïe des menaces de Dieu, mais que vous vous empressez de dire avec Félix : Va-t’en pour cette fois, et quand j’en aurai le loisir, je te rappellerai. Chaque fois, dis-je, que vous agissez ainsi, souvenez-vous, ô pécheurs, que vous prenez en quelque sorte le marteau et le clou pour déchirer de nouveau la main meurtrie de mon Sauveur et que vous rouvrez ses plaies sanglantes! Ou bien encore, chaque fois que vous outragez Christ dans la personne d’un de ses membres; chaque fois que vous insultez ses ministres; que vous entravez l’œuvre de ses serviteurs; que vous faites tort à l’Évangile par votre mauvais exemple, ou que par vos railleries, vous détournez une âme de la recherche de la vérité; chaque fois, dis-je, que vous commettez de telles choses, vous trempez, autant qu’il dépend de vous, dans cette grande iniquité, dans ce forfait sans égal qui a attiré sur Israël la malédiction divine, et en punition duquel il a été condamné, lui, le peuple élu, à errer sur la surface de la Terre, jusqu’au jour de la glorieuse réapparition du Messie, de ce Messie qui a paru une première fois pour souffrir, mais qui reviendra pour régner; de ce Prince de gloire que dans ce moment même Juifs et Gentils attendent avec une égale anxiété, et qu’Israël doit reconnaître enfin comme son Roi.
Je me propose aujourd’hui, mes chers auditeurs, d’établir un parallèle entre vous et la nation juive; ou plutôt, je voudrais, avec l’aide de Dieu, vous faire sentir, en appliquant mon texte à votre conscience, que si vous rejetez Christ, vous commettez le même péché et vous encourez la même malédiction que le peuple déicide. Si je n’étais pas venu et que je ne leur eusse pas parlé, dit Jésus-Christ, ils n’auraient point de péché; mais maintenant, ils n’ont point d’excuse de leur péché. Et nous observerons d’abord que Christ vient à vous et vous parle, tout aussi réellement qu’aux anciens Juifs, par l’organe de ses ministres. Nous établirons, en second lieu, que le rejet du message de Christ aggrave la culpabilité de l’homme, et ensuite que la prédication de l’Évangile le laisse absolument sans excuse. Enfin, nous avertirons brièvement, mais solennellement, tous ceux qui méprisent le Sauveur, de la condamnation effroyable qui les attend.
I.
Christ vient à vous et parle à vos consciences par l’organe de ses ministres : tel est, ai-je dit, le premier point sur lequel je désire appeler votre attention.
Lorsque, dans le désert, le peuple d’Israël méprisa Moïse et murmura contre lui, le serviteur de Dieu répondit avec douceur : Vos murmures ne sont pas contre nous, mais ils sont contre l’Éternel (Exode 16:8). Et ce langage, mes frères, tout véritable ministre de Christ est en droit de le tenir. Oui, nous appuyant sur l’Écriture, nous pouvons dire en toute vérité : « Qui nous rejette ne nous rejette pas nous-mêmes, mais il rejette celui qui nous a envoyés; et qui méprise notre parole méprise, non point la parole d’un homme, mais celle du Dieu tout-puissant. » Sans doute, le ministre de l’Évangile n’est qu’un homme, qu’un homme faible et pécheur; il n’est investi d’aucun pouvoir sacerdotal; mais Dieu l’a choisi et l’a revêtu des dons du Saint-Esprit, afin qu’il annonçât le salut à ses frères; et lorsqu’il prêche la vérité avec la vertu qui lui vient d’en haut, le Seigneur ne dédaigne pas de l’appeler son ambassadeur; il le place comme une sentinelle sur les murs de Sion; il lui donne la charge d’âmes, et il déclare que celui-là se rend coupable de rébellion contre le Très-Haut qui foule aux pieds le fidèle message de son fidèle serviteur. Si je parle de mon propre chef, peu importe assurément que je sois écouté ou non; mais si je parle en ma qualité d’ambassadeur de Christ, prenez garde de ne pas mépriser ma voix. Si je viens à vous avec les raisonnements de la sagesse humaine, libre à chacun d’accepter ou de rejeter mes enseignements; mais si par la puissance de l’Esprit, je vous annonce la Parole qui est descendue du ciel, vous suppliant instamment de la recevoir, souvenez-vous que si vous la rejetez, c’est aux risques et périls de vos âmes! Car, encore une fois, ce n’est pas nous qui parlons, mais c’est l’Esprit de l’Éternel notre Dieu qui parle par nous. Oh! qu’il est sacré, qu’il est solennel le ministère évangélique, considéré à ce point de vue! Fils des hommes, mettez-vous bien dans l’esprit que nous ne sommes autre chose que l’écho de la voix de Dieu! Tout ministre de l’Évangile qui a véritablement reçu vocation d’en haut ne fait que transmettre à ses frères le message qu’il a reçu de son Maître; et il n’a garde de rien changer à ce message, car il a constamment sous les yeux cette grave exhortation de l’Apôtre : Prends garde à toi et à l’instruction; persévère dans ces choses; car en faisant cela, tu te sauveras toi-même et ceux qui t’écoutent (1Timothée 4:16), et il croit toujours entendre derrière lui une voix menaçante qui murmure à son oreille : Si tu n’avertis pas le méchant, il mourra dans son iniquité, mais je redemanderai son sang de ta main (Ézéchiel 33:8)! Oh! que ne puis-je, en ce moment même, tracer en caractères de feu, au milieu de cette grande assemblée, ce cri d’un ancien prophète : 0 terre, terre, terre, écoute la parole de l’Éternel! car en vérité je vous le dis, aussi longtemps que nous annonçons l’Évangile, pur de tout alliage, c’est comme si Dieu vous exhortait par notre ministère, et la Parole que nous prêchons a autant de droits à votre respect que si L’Éternel lui-même vous parlait du sommet de Sinaï, au lieu de vous parler par l’humble intermédiaire de ses indignes serviteurs.
Et maintenant, recueillons-nous devant cette sérieuse vérité, et que chacun de nous se pose cette question : « N’ai-je pas offensé Dieu de la manière la plus criante, en négligeant les moyens de grâce qu’il a mis à ma portée? » J’en appelle à votre conscience, mes frères : que de fois ne vous êtes-vous pas tenus éloignés de la maison de Dieu, quand Dieu lui-même y faisait entendre sa voix! Qu’eussiez-vous pensé, je vous le demande, des enfants d’Israël, si, méprisant la convocation de Jéhovah, ils eussent erré dans le désert le jour du sabbat, au lieu d’aller au pied de la sainte montagne écouter les ordres de l’Éternel? Et pourtant c’est là ce que vous avez fait. Vous avez recherché vos aises et vos plaisirs, et négligé la maison de prières; vous avez écouté le chant de sirène de la tentation, et fermé l’oreille à la voix du Très-Haut; vous avez erré dans les sentiers tortueux du monde, au lieu de vous rendre à l’invitation de l’Éternel votre Dieu qui vous appelait dans son sanctuaire. Et alors même que vous y êtes venus, que de fois y avez-vous apporté un œil distrait, une oreille inattentive! Vous avez entendu comme si vous n’entendiez point. L’oreille de votre corps a bien saisi quelques sons; mais l’homme intérieur, qui est en vous, a été sourd. Semblables à l’aspic qui bouche son oreille et qui n’écoute point la voix du charmeur le plus expert en charmes (Psaumes 58:5-6), vous n’avez tenu compte ni de nos prières ni de nos menaces. Bien plus : l’Esprit de Dieu lui-même, j’ose l’affirmer, a parlé une fois ou l’autre à vos consciences. N’est-il pas vrai qu’il y a eu un jour au moins dans votre vie où, assis peut-être à cette même place, sur ce même banc, vous tremblâtes en écoutant l’Évangile? Vos genoux s’entrechoquaient, vous étiez éperdus, et tandis qu’un puissnt Boanerges tonnait contre le pécheur, lui criant de la part du Maître : Prépare-toi à la rencontre de ton Dieu, considère tes voies, mets ordre à ta maison, car tu t’en vas mourir, — il vous semblait entendre la voix, non d’un homme, mais d’un ange du ciel. Et pourtant (ô inconcevable folie!) à peine eûtes-vous franchi le seuil de la maison de Dieu, que déjà vous aviez tout oublié! Vous avez éteint l’Esprit, et contristé l’Esprit de grâce; vous avez imposé silence aux murmures de votre conscience; vous avez étouffé dès le berceau ces prières naissantes qui commençaient à se former dans vos cœurs, et noyé impitoyablement dans les distractions du monde ces jeunes et saintes aspirations qui venaient d’éclore dans vos âmes. Vous avez repoussé loin de vous tout ce qui est bon, tout ce qui est sacré. Vous êtes retournés à vos mauvaises voies; vous avez de nouveau erré sur les montagnes du péché et dans les vallées de l’iniquité. Et en agissant ainsi, savez-vous, mes amis, ce que vous avez fait? Vous avez méprisé Dieu!… Mépriser Dieu! Oh! si le Saint-Esprit daignait en cet instant faire sentir à chacun de vous tout ce qu’il y a de terrible dans ces deux mots, je suis assuré que du sein de cette grande assemblée, s’élèverait une voix de deuil et de lamentation, et que ce lieu de culte serait changé en un lieu de pleurs et de grands gémissements! Oh! mes frères, avoir méprisé Dieu, foulé aux pieds le Fils de l’homme, traité légèrement sa croix, rejeté les tendres invitations de son amour et les avertissements de sa grâce! Quelle énormité! Quel crime!
N’avez-vous jamais sérieusement réfléchi à ces choses? Vous avez cru peut-être qu’en rejetant la prédication de l’Évangile, vous ne méprisiez qu’un homme : pensez désormais, je vous en conjure, que c’est Christ que vous méprisez. Car Christ vous a parlé; il vous a parlé, j’ose le dire, par la bouche même de son faible serviteur qui est maintenant devant vous. Ah! oui, Dieu m’est témoin que souvent Christ a pleuré avec ces yeux et parlé avec ces lèvres! Dieu m’est témoin que je n’ai recherché qu’une seule chose parmi vous : le salut de vos âmes. Tantôt, par des paroles rudes et sévères, j’ai voulu vous contraindre à chercher un refuge au pied de la croix; tantôt, par des accents émouvants et tendres, j’ai essayé de vous gagner à mon Rédempteur. Et était-ce moi qui vous parlais alors? Non! c’était Jésus qui vous parlait par moi. C’était lui qui vous criait : «Regardez à moi, vous tous les bouts de la terre, et soyez sauvés. » C’était lui qui vous disait : « Venez à moi, vous tous qui êtes travaillés et chargés, et je vous soulagerai! » C’était lui qui vous avertissait que vous péririez si vous négligiez un si grand salut. Si donc vous avez ouï ces appels, et que vous les avez oubliés; si vous avez reçu ces invitations et que vous les avez refusées, souvenez-vous que vous avez méprisé, non pas nous, mais notre Maître; et malheur à vous, vous dis-je, malheur à vous, à moins que vous ne vous repentiez, car c’est une chose terrible que de mépriser la voix de celui qui nous parle des cieux (Hébreux 12:25) !
II.
Mais passons au second point de notre sujet, qui est celui-ci : le rejet de l’Évangile AGGRAVE LA CULPABILITÉ DE L’HOMME.
Et d’abord, un mot d’explication est nécessaire, sans quoi ma pensée pourrait être mal comprise. Il est des personnes qui, étant allées dans la maison de Dieu, ont été tellement saisies par le sentiment de leurs péchés, qu’elles n’osent y retourner; et Satan a même fini par les persuader qu’il est de leur devoir de fuir toute occasion d’entendre l’Évangile, « car, leur dit-il, plus vous l’entendrez, plus sévère sera votre condamnation. » C’est une erreur, mes amis. Non, vous ne risquez pas d’aggraver votre condamnation par le fait seul que vous allez dans la maison de Dieu; vous l’aggraveriez bien plutôt en n’y allant pas; car en vous en tenant éloignés, vous rejetez deux fois le Seigneur : vous le rejetez matériellement aussi bien que spirituellement. Non seulement, comme le paralytique qui était couché auprès du réservoir de Béthesda, vous n’entrez point dans les eaux de la grâce, mais encore vous ne voulez point, comme lui, vous tenir auprès du réservoir; en d’autres termes, vous refusez de vous placer sous l’influence de la Parole de Dieu; c’est pourquoi vous amassez sur votre tête une double mesure de responsabilité. Je le répète : la simple audition de l’Évangile n’aggrave pas le péché de l’homme; ce qui l’aggrave, c’est le rejet conscient et volontaire de cet Évangile. Ainsi, tout homme qui, après avoir écouté la bonne nouvelle du salut, s’en va pour rire et se moquer de ce qu’il vient d’entendre, ou bien qui, après avoir reçu de sérieuses impressions, permet aux inquiétudes et aux plaisirs de la vie d’étouffer la bonne semence dans son cœur, un tel homme accroît sa culpabilité de la manière la plus effrayante.
Mais comment le fait-il? De deux manières. D’abord, il se rend coupable d’un nouveau péché, d’un péché qu’il n’avait jamais commis auparavant. Qu’on m’amène un Hottentot, un habitant de Kamschatka, un sauvage enfant des déserts, auquel n’est jamais parvenu l’Évangile de Jésus. Il se peut que cet homme ait commis tous les forfaits qui figurent dans le catalogue du crime; toutefois, je connais un péché dont il est innocent : il n’a jamais rejeté la Parole de Christ, puisqu’il n’a jamais eu l’occasion de la connaître. Mais quant à vous, mes amis, qui êtes placés sous l’influence directe de l’Évangile, vous avez par cela même une nouvelle occasion d’offenser Dieu, et chaque fois que vous avez repoussé ses appels, sachez-le bien, vous avez ajouté un péché de plus à la liste déjà si longue de vos transgressions. Je le sais, de telles paroles sonnent mal aux oreilles de bien des gens. Souvent, j’ai été repris par certains hommes qui se sont détournés de la vérité, parce que j’enseigne que le simple rejet de Christ constitue un péché. Mais que m’importent les attaques des ennemis de l’Évangile? Que m’importent leurs injures? J’ai pour moi la Parole de Dieu, et cela me suffit. Oui, la responsabilité de l’homme est clairement enseignée dans la Bible, et je ne pense pas qu’un ministre de Christ puisse être net du sang des âmes confiées à ses soins, s’il ne rend de fréquents et solennels témoignages à cette vérité capitale. « Quand l’Esprit de vérité sera venu, il convaincra le monde de péché, de justice et de jugement : de péché, parce qu’ils n’ont pas cru en moi. — Or, voici la cause de la condamnation; c’est que la lumière est venue dans le monde, et que les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière. — Celui qui ne croit point est déjà condamné, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. — Si je n’eusse pas fait parmi eux les œuvres qu’aucun autre n’a faites, ils n’auraient point de péché; mais maintenant, ils les ont vues, et ils ont haï et moi et mon Père. — Malheur à toi, Chorazin! malheur à toi, Bethsaïda! Car si les miracles qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Tyr et dans Sidon, il y a longtemps qu’elles se seraient repenties en prenant le sac et la cendre; c’est pourquoi Tyr et Sidon seront traitées moins rigoureusement au jour du jugement que vous. — Il nous faut faire une plus grande attention aux choses que nous avons entendues, de peur que nous les laissions écouler; car si la parole qui a été annoncée par les anges a eu son effet, et si toute transgression et toute désobéissance a reçu une juste punition, comment échapperons-nous si nous négligeons un si grand salut? — Si quelqu’un avait violé la loi de Moïse, il mourait sans miséricorde sur le témoignage de deux ou de trois personnes; combien plus grand croyez-vous que doive être le supplice dont sera jugé digne celui qui aura foulé aux pieds le Fils de Dieu, et tenu pour une chose profane le sang de l’alliance, par lequel il avait été sanctifié, et qui aura outragé l’Esprit de la grâce? (Jean 16:8-9; 3:18-19; 15:24 ; Luc 10:13-14; Héb. 2:1-3; 10:28-29)»
Vous le voyez, mes frères, je cite textuellement l’Écriture; or, si ces divers passages ne signifient point que le rejet de Christ est un péché, et le péché qui, par-dessus tous les autres, rend l’âme humaine passible de la perdition éternelle; si, dis-je, ils n’ont point ce sens, j’affirme qu’ils n’en ont absolument aucun, mais qu’ils sont des lettres mortes dans la Parole de Dieu. Assurément l’adultère, le meurtre, le larcin, le mensonge, tous ces péchés sont mortels et damnables; toutefois, la repentance peut les effacer par les mérites du sang de Jésus. Mais une âme qui rejette Christ est perdue sans espoir. Le meurtrier, le voleur, l’intempérant peuvent entrer dans le royaume des cieux si, haïssant sincèrement leurs iniquités, ils saisissent la croix de Christ; mais tout homme qui ferme son cœur au Seigneur Jésus, qu’il soit un grand pécheur ou un homme vertueux selon le monde, sera perdu sans ressource.
Et considérez je vous prie, mes chers auditeurs, combien est odieux le péché que vous commettez, en repoussant Christ. On peut dire avec vérité qu’il contient dans ses entrailles tous les autres péchés. Et d’abord, j’y vois le meurtre : car si un criminel sur l’échafaud refuse la grâce qui lui est offerte, ne devient-il pas son propre meurtrier? J’y vois l’orgueil : car si vous vous détournez du Sauveur, c’est votre cœur orgueilleux qui en est cause. J’y vois la rébellion : car vous faites la guerre à Dieu en méprisant son Fils. J’y vois le crime de haute trahison : car vous vous insurgez contre votre Souverain légitime, vous prenez les armes contre Celui qui a été sacré Roi de toute la terre. Oh! mes frères, je vous en supplie, réfléchissez à votre conduite. Quoi! le Seigneur Jésus est descendu du ciel, il a été cloué sur un bois infâme; là, il est mort au milieu d’indicibles angoisses, et du haut de cette croix maudite, il abaisse sur vous un regard d’amour, en vous disant : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés! » Et vous osez le mépriser encore! Et vous refusez d’écouter ses appels! Et vous passez à côté de lui avec indifférence! Ah! n’infligez-vous pas à mon Sauveur la plus cruelle des blessures? Et ne faites-vous pas preuve de l’ingratitude la plus insigne, la plus révoltante, la plus diabolique en vous détournant de Celui qui a donné sa vie pour vous?… Oh! si vous vouliez être sage! Si vous vouliez comprendre ceci! Si vous considériez votre dernière fin!
Mais il y a plus. En rejetant Christ, non seulement vous ajoutez un nouveau péché à tous ceux que vous avez déjà commis, mais encore vous rendez ceux-ci beaucoup plus graves. Il ne peut pas faire le mal à aussi bon marché qu’un autre, l’homme qui a été placé sous l’influence de l’Évangile. Lorsque des personnes sans lumière et sans intelligence spirituelle offensent Dieu, leur conscience ne les reprend pas toujours; aussi leur culpabilité n’est-elle pas aussi grande que celle de l’âme qui pèche étant éclairée. As-tu volé avant d’entendre la Parole de Dieu? Tu as mal fait; mais vole après avoir entendu cette Parole, et tu seras dix fois plus coupable. As-tu menti avant de connaître l’Évangile? Tout menteur aura sa part dans l’étang de feu; mais continue à mentir après l’avoir connu, et il semble en vérité que pour toi, la fournaise de la géhenne doive être chauffée sept fois autant que de coutume. Celui qui pèche étant dans l’ignorance est à quelque degré excusable; mais celui qui pèche contre la lumière et la connaissance, pèche dans les circonstances les plus aggravantes. Rejetez Christ et, du même coup, vous noircissez tous vos autres péchés. Le mépris de Christ est comme la lime à l’aide de laquelle le pécheur révolté aiguise la hache, le coutre et l’épée dont il se sert pour combattre le Très-Haut. Mieux vous connaissez Christ, plus votre culpabilité grandit et augmente si vous le rejetez. Telle est, mes frères, la vérité de Dieu. Vérité solennelle, vérité saisissante, et que les ministres de l’Évangile ne devraient jamais annoncer sans être émus jusqu’au fond de l’âme. Oh! qu’il est sérieux surtout d’avoir un tel message à vous faire entendre, à vous, mes chers auditeurs, qui de tous les hommes vivant sous le soleil, êtes peut-être ceux auxquels les paroles de mon texte s’appliquent avec le plus de force! Oui, vous dis-je, s’il est des âmes dans le monde auxquelles il sera beaucoup redemandé, ce sont les vôtres! Sans doute, vous n’êtes pas les seuls qui jouissiez de grands privilèges; vous n’êtes pas les seuls qui ayez entendu prêcher l’Évangile avec pureté et avec force; mais, j’en atteste le Dieu vivant, ce Dieu qui au dernier jour jugera entre vous et moi, il n’est personne sur la terre qui ait plus reçu que vous. De toutes les puissances de mon être, je me suis efforcé d’être fidèle envers vos âmes. Jamais je n’ai cherché, en employant des mots sonores ou un langage technique, à rehausser ma propre sagesse. Je vous ai parlé clairement, nettement, familièrement; et si parfois, il est échappé de mes lèvres un mot qui ne fût pas à la portée de tous, c’est à mon insu ou par mégarde. Je vous ai annoncé l’Évangile dans toute sa simplicité. Jamais, je puis le dire, je ne vous ai parlé avec froideur. Comme les anciens prophètes, chaque fois que j’ai monté les degrés de la chaire, j’aurais pu m’écrier : La charge de l’Éternel, la charge de l’Éternel est sur moi! Car mon cœur était gros de parler, et mon âme bouillonnait au-dedans de moi; et alors même que j’ai prêché avec faiblesse, si mes paroles étaient rudes et mal choisies, du moins puis-je me rendre le témoignage qu’elles partaient de l’abondance de mon cœur. J’ai répandu devant vous mon âme tout entière; j’ai essayé de tous les moyens pour vous rendre attentifs aux choses de Dieu; et si en bouleversant le ciel et la terre, j’avais cru trouver un mot qui pût vous gagner à mon Sauveur, Dieu sait que j’aurais tenté de le faire. Je vous ai annoncé tout le conseil de mon Maître; je vous ai repris sans ménagements; je n’ai point fait usage de mots couverts. J’ai déclaré à ce siècle ses forfaits, et à chacun de vous ses iniquités. Je n’ai eu garde de mitiger la Bible pour plaire, aux goûts charnels des hommes. Quand Dieu a dit : Damner, j’ai dit : Damner; je n’ai point remplacé ce mot qui froisse les oreilles délicates de notre génération, par celui plus doux de condamner. J’ai appelé les choses par leur vrai nom; je n’ai ni voilé ni déguisé la vérité; mais à toute conscience humaine, je me suis efforcé, comme en présence de Dieu, d’exposer le salut avec hardiesse, avec puissance, avec ferveur et avec zèle. Je n’ai eu honte ni d’élever bien haut les glorieuses doctrines de la grâce (quoiqu’en cela faisant je me sois attiré les injures des ennemis de la croix) ni de prêcher comme aujourd’hui la solennelle responsabilité de l’homme (quoi qu’une autre caste de gens m’ait mis à l’index pour cette raison). Et Dieu sait, mes chers auditeurs, que si je parle de cette manière, ce n’est point pour me glorifier; c’est uniquement afin de vous faire rentrer en vous-mêmes, et afin de vous prouver que vous êtes les plus coupables des hommes si vous rejetez l’Évangile. Car, encore une fois, cet Évangile, vous le connaissez; il vous est annoncé en cet instant même; si donc vous persistez à mépriser Christ, souvenez-vous que vous amassez sur vos têtes une mesure toujours plus grande de la colère de Dieu.
III.
Et maintenant, développons notre troisième proposition. La prédication de l’Évangile de Christ, avons-nous dit, enlève toute excuse a ceux qui l’ont entendu et rejeté. Hélas, combien toute excuse est vaine devant l’œil de Celui qui sonde toutes choses! Dans le grand jour de la tempête de la colère de Dieu, malheur à l’âme qui n’aura pour se mettre à couvert que le chétif abri d’une excuse! Néanmoins, je le reconnais, une excuse vaut mieux que rien. Et de même qu’un homme qui n’aurait ni asile ni refuge, s’estimerait bien heureux, par la pluie et le froid, de pouvoir du moins s’envelopper dans un manteau, de même toute conscience qui se sent coupable est bien aise, à défaut de mieux, de rassembler autour d’elle quelques misérables lambeaux d’excuses. Mais maintenant, dit Jésus Christ, maintenant que je suis venu à vous et que je vous ai parlé, maintenant vous n’avez plus d’excuse de vos péchés. Voyageur égaré, tu devras affronter la tempête sans le vêtement qui te protégeait. Âme coupable, tu devras paraître devant ton Juge sans le plus léger voile pour atténuer tes iniquités : dépouillée, découverte, démasquée, tu es laissée absolument sans excuse.
Pour mieux vous faire saisir cette importante vérité, je vais passer en revue, mes chers amis, quelques-unes des excuses derrière lesquelles l’homme se plaît à se retrancher, et nous verrons ce qu’elles deviennent en présence de la fidèle prédication de l’Évangile.
Et d’abord, l’excuse qui se retrouve le plus souvent dans la bouche du pécheur est celle-ci: « Quand j’ai commis telle ou telle iniquité, j’ignorais que je faisais mal. » Il est possible que le païen ait quelque droit d’alléguer cette excuse, mais quant à vous, mes frères, je soutiens que vous n’en avez aucun. Par sa loi sainte, Dieu vous a fait solennellement connaître ce qui est mal. Vous savez les dix commandements; vous avez lu aussi le commentaire qu’en a fait notre Maître; vous n’ignorez pas qu’il a étendu et spiritualisé la loi morale, et qu’il nous a appris, par exemple, que le septième commandement : Tu ne commettras point adultère, défend non seulement tout acte impur, mais toute pensée ou tout regard de convoitise. Si le farouche Indien commet un meurtre, il est, jusqu’à un certain point, excusable : je ne doute pas que sa conscience ne lui crie qu’il fait mal de répandre le sang de son frère, mais ses livres sacrés lui enseignent qu’il fait bien; c’est pourquoi il a une ombre d’excuse. De même lorsque le mahométan[1] se livre sans contrainte à la volupté, je ne doute pas qu’une voix intérieure ne le condamne; toutefois, puisque son Coran légitime l’impureté, on peut admettre en sa faveur quelques circonstances atténuantes. Mais vous qui faites profession de croire à la Bible, vous qui la possédez dans vos maisons et qui n’avez qu’à sortir dans vos rues pour entendre annoncer l’Évangile, quelle excuse semblable, je vous le demande, pourriez-vous faire valoir? Ne péchez-vous pas avec la loi divine affichée, en quelque sorte, sur la muraille devant vos yeux? Ne violez-vous pas volontairement les ordres bien connus de Celui qui a parlé des cieux, et qui vous a parlé directement à vous-mêmes?
Mais , dira un autre , lorsque j’ai péché je ne savais pas à quel sévère châtiment je m’exposais. » Vous ne le saviez pas, mon cher auditeur! Et à qui la faute, je vous prie? L’Évangile ne vous a-t-il pas averti? Jésus-Christ ne vous a-t-il pas dit et redit que ceux qui ne veulent pas le recevoir seront jetés dans les ténèbres de dehors, dans le lieu des pleurs et des grincements de dents? Ne vous a-t-il pas déclaré expressément que les méchants s’en iront aux peines éternelles, et les justes à la vie éternelle? Ne vous a-t-il point parlé lui-même et du ver qui ne meurt point et du feu qui ne s’éteint point? Et vos pasteurs (si du moins ils sont fidèles), ne vous ont-ils pas fait entendre à leur tour ces redoutables vérités? Ah! c’est en vain que vous essaieriez de le nier : vous avez péché, sachant très bien que vous perdiez votre âme! Vous avez bu la coupe empoisonnée, sachant très bien que la mort éternelle était au fond; vous l’avez vidée jusqu’à la lie, sachant très bien que dans chaque goutte de cette coupe brûlait déjà le feu de l’enfer! Vous avez détruit votre âme les yeux ouverts. Comme un bœuf qui s’en va à la boucherie, et comme un fou qui s’en va aux ceps pour être châtié (Proverbes 7:22), vous avez marché tout droit à votre ruine; comme l’agneau qui lèche le couteau de l’égorgeur, vous avez caressé les instruments de votre perte; et vous avez fait tout cela, je le répète, sciemment, volontairement, avec une pleine connaissance de cause : c’est pourquoi vous êtes sans excuse.
« Il est vrai que je connais la loi de Dieu, dira-t-on encore; il est vrai aussi qu’en faisant le mal, je savais à quoi je m’exposais; mais j’ignore ce que je dois faire pour être sauvé. » Y a-t-il ici quelqu’un qui ait l’audace de présenter une telle excuse? En vérité, il faudrait qu’il eût un front d’airain! Depuis dix, vingt, trente, quarante ou cinquante années, la plupart d’entre vous entendent la prédication de l’Évangile. Ces mots : « Crois et vis ! crois et vis! » retentissent chaque jour à vos oreilles. Comment donc oseriez-vous dire: « Nous ne connaissons point le chemin du salut? » Dès l’âge le plus tendre, vous avez été placés sous l’influence de la vérité. Le doux nom de Jésus est un des premiers mots que votre langue enfantine ait appris à bégayer. Vous avez sucé pour ainsi dire le lait du saint Évangile avec le lait de votre mère. Et pourtant, malgré tous ces privilèges, malgré toutes ces faveurs, vous n’avez jamais cherché Christ. Oh! prenez garde, je vous en conjure! « Connaissance est puissance, » dit un proverbe humain, et, appliqué aux choses de la terre, cela peut être vrai; mais hélas! pour ce qui est des choses de Dieu, connaissance est malheur, malheur, MALHEUR, à moins que la foi ne vienne s’y joindre! Oui, vous dis-je, malheur à l’homme qui connaît le bien et qui ne le fait pas, car la colère de Dieu tombera de tout son poids sur son âme!
Mais il me semble entendre une autre excuse. « Je conviens, dit un de mes auditeurs, que l’Évangile m’a été annoncé; mais ce qui m’a empêché de le prendre au sérieux, c’est que je n’ai jamais vu personne le mettre en pratique. » Je conviens, à mon tour, que dans la bouche de quelques-uns cette excuse peut avoir une certaine valeur; mais pour le plus grand nombre, j’affirme qu’elle est fausse et sans fondement. Ah! homme du monde, tu prends plaisir à critiquer les misères des chrétiens. Tu dis : « Ils sont en contradiction avec leurs principes; leur vie n’est pas telle qu’elle devrait être »; et en ceci, hélas! tu ne dis que trop vrai. Cependant, interroge ton passé, cherche dans tes souvenirs, et dis-moi si tu n’as jamais connu un seul chrétien dont tu aies été forcé d’admirer le caractère. C’était peut-être ta mère, la mère qui te donna le jour. Ah! n’est-il pas vrai qu’il y a toujours eu dans la douce figure, dans la sainte vie de celle qui t’enfanta, un problème que tu n’as jamais pu résoudre, un écueil devant lequel ton incrédulité a été contrainte à s’arrêter? Peut-être, plus d’une fois dans ta vie, as-tu été sur le point de rejeter entièrement l’Évangile; mais dans ces moments de tentation, l’image vénérée de ta mère s’est dressée devant toi, et tu as été vaincu! Ne te rappelles-tu pas, en remontant jusqu’à l’aube de tes souvenirs, ne te rappelles-tu pas que souvent en ouvrant tes yeux au matin, tu rencontrais le regard humide de ta mère attaché sur toi avec amour, et tu l’entendais murmurer tout bas : « Dieu te bénisse, mon enfant! Puisses-tu vivre pour aimer ton Sauveur. » Ton père te reprenait souvent; elle, presque jamais; mais par des paroles pleines de tendresse, elle cherchait à toucher ton cœur. Souviens-toi de la petite chambre haute où elle se retirait avec toi, et entourant ton cou de ses bras, te consacrait à Dieu et priait le Seigneur Jésus de te sauver dès les jours de ta jeunesse. Souviens-toi de la lettre qu’elle glissa dans ta main, de la Bible dans laquelle elle écrivit ton nom, lorsque tu t’éloignas du toit paternel. Souviens-toi surtout de son affliction lorsqu’elle apprit que tu commençais à te plonger dans les plaisirs du monde, et du douloureux regard qu’elle attacha sur toi la dernière fois que tu la quittas. « Mon fils, » te dit-elle en étreignant ta main, « si tu marches dans les voies de l’iniquité, tu feras descendre mes cheveux blancs avec douleur au sépulcre. » Elle mourut sans que tu la revisses, mais sur son lit de mort elle pensa à toi, et au moment d’expirer, elle murmurait encore : « Oh! si seulement je savais que mon fils se convertît à Dieu, je m’en irais parfaitement heureuse!… » Eh bien, jeune homme, ne sais-tu pas que ta mère, du moins, n’était pas une hypocrite? Peux-tu douter que sa piété ne fût une chose réelle? Tu pouvais, il est vrai, te moquer de ton pasteur, tu pouvais dire qu’il faisait son métier; mais de ta mère, tu ne pouvais te moquer : elle était chrétienne, et ton esprit sceptique lui-même était forcé de l’avouer. Que de fois ne supporta-t-elle pas ton humeur irascible et ne répondit-elle que par la douceur à tes paroles brusques! Car c’était une créature angélique que ta mère; elle semblait en vérité trop pure pour ce monde; et quoi que tu puisses avoir oublié, sûrement tu te souviens de cela, jeune homme! Or, je te le demande, un tel exemple ne t’enlève-t-il pas toute excuse de ton péché? Jésus-Christ t’a parlé par la vie de ta mère; tu as eu sous les yeux une preuve vivante de la réalité du christianisme. Si donc après cela tu persistes à le rejeter, quelle ne sera pas la rigueur de ta condamnation!
Mais ici je prévois une objection. Plusieurs de ceux qui m’écoutent me répondront qu’ils n’ont pas eu une telle mère. « Notre première école, me diront-ils, a été la rue; le premier exemple dont nous nous souvenions, celui d’un père blasphémateur. » Cela peut-être, mes amis; mais souvenez-vous, je vous prie, qu’il est un exemple parfait, un modèle accompli, savoir, Christ; et que ce modèle, si vous ne l’avez pas contemplé de vos yeux, vous avez pu le voir dans sa Parole. Oui, Jésus-Christ, l’Homme de Nazareth, a été un homme parfait; il n’a point commis de péché, et dans sa bouche il ne s’est trouvé aucune fraude (1 Pierre 2:22). Si donc l’excellence chrétienne ne vous a jamais été démontrée par la vie des disciples, elle l’a été du moins par la vie du Maître; par conséquent, en avançant cette excuse, vous avancez un mensonge; car l’exemple de Christ, les œuvres de Christ, aussi bien que les paroles de Christ, vous laissent sans excuse de votre péché.
Enfin, quelques-uns de vous me diront peut-être : « Nous avons certainement entendu bien des appels, mais ces appels n’ont jamais trouvé le chemin de notre conscience; nous avons souvent écouté les ministres de l’Évangile, mais ils n’ont jamais fait d’impression sur nous. » Ah! mes amis, ou je me trompe singulièrement, ou il en est bien peu parmi vous qui puissent avec vérité tenir ce langage. Jeune homme et jeune fille, je me lèverai en témoignage contre vous au jour du jugement, car je sais que vos consciences ont été atteintes. N’ai-je pas vu, il n’y a qu’un instant, des larmes silencieuses, les larmes, je l’espère, de la repentance, s’échapper de vos yeux? Et quant à vous, vieillards, qui aujourd’hui, hélas! êtes si difficiles à émouvoir, vous n’avez pas toujours été ainsi. Il fut un temps où votre âme était capable de recevoir des impressions. Oh! souvenez-vous, vieillards, que les péchés de votre jeunesse consumeront vos os, si vous vous êtes obstinés à rejeter l’Évangile. Maintenant je le sais, votre vieux cœur est comme blasé; mais vous n’en êtes que plus inexcusables, car il était sensible autrefois et même à présent, n’est-il pas vrai, pauvres vieillards, qu’il n’est pas complètement endurci? Non, j’en suis convaincu, pas une des âmes qui m’écoutent ne peut dire qu’elle n’a jamais été émue par la prédication de l’Évangile. Dans ce moment même, j’ose affirmer que plusieurs d’entre vous soupirent après la solitude de leur chambre, car ils sont si troublés par le sentiment de leurs péchés, qu’ils brûlent de pouvoir, en toute liberté, répandre leurs cœurs devant Dieu. Mais, hélas! que dureront ces émotions, ce repentir, ces larmes?…
On faisait remarquer un jour à un prédicateur éminent quel étonnant spectacle présentait un auditoire tout en larmes. « Je connais une chose bien autrement étonnante, répondit celui-ci; c’est la facilité avec laquelle les gens oublient ce qui les a fait pleurer dès qu’ils ont franchi le seuil du temple.» Est-ce là ce que vous allez faire, mes amis? Je ne sais! Quoi qu’il en soit, souvenez-vous que l’Esprit de Dieu a contesté avec vos âmes. Souvenez-vous qu’aujourd’hui encore le Seigneur a comme placé une barrière sur vos pas; il a creusé un fossé au travers de votre chemin; il a élevé un signal d’alarme devant vos yeux et vous a crié : « Fils des hommes, prenez garde, prenez garde, prenez garde! Vous vous précipitez tête baissée dans les voies de la perdition! » Et il m’a envoyé, moi son serviteur, pour vous avertir de votre danger. Et c’est en son nom que je vous dis à tous : « Arrêtez, arrêtez, arrêtez! Ainsi a dit l’Éternel : Considérez vos voies; retournez, retournez, convertissez-vous; et pourquoi mourriez-vous, ô maison d’Israël? » Mais si vous repoussez ce nouvel appel de mon Maître, que vous dirai-je, ô pécheurs?…. Qu’il en soit comme vous le voulez! Si vous étouffez volontairement ces étincelles de la grâce divine, si vous éteignez ces premières lueurs de l’Esprit-Saint, si vous êtes résolus à vous perdre pour l’éternité, qu’il en soit comme vous le voulez! Seulement, rappelez-vous que je suis net du sang de vous tous! C’est à vous-mêmes que vos âmes seront redemandées; c’est vous seuls qui serez responsables devant Dieu de votre rébellion et de votre incrédulité.
IV.
Il ne me reste plus que quelques paroles à ajouter, mais ces paroles sont terribles au plus haut point; car je dois, au nom de mon Maître, prononcer un verdict de condamnation. Je dois déclarer solennellement que le sort le plus effroyable attend tous ceux qui vivent et qui meurent en rejetant Christ. Oui, une complète, une irrémédiable destruction les enveloppera infailliblement. S’il y a des degrés dans les peines éternelles, sans contredit, le plus haut degré sera réservé à toute âme qui n’aura pas voulu profiter des invitations de Christ. N’avez-vous pas, mes frères, remarqué ce passage de l’Évangile, où il est dit que le serviteur infidèle, celui qui a passé son temps à battre ses compagnons de service, à manger, à boire et à s’enivrer aura sa portion… (avec qui, pensez-vous?) — avec les incrédules! Comme si l’enfer était tout particulièrement l’héritage des incrédules! Comme si l’abîme avait été creusé, non pas tant pour le fornicateur, pour le blasphémateur, pour l’intempérant, que pour celui qui méprise Christ!
C’est qu’en effet, la réjection de Christ constitue le péché essentiel, le vice primordial. Lorsque les pécheurs comparaîtront en jugement, leurs autres iniquités les suivront, mais celle-là les précédera. Mes frères, transportez-vous par la pensée à cet instant suprême, à ce jour du jugement qui approche. Il n’y a plus de temps; le son de la dernière trompette a retenti dans l’espace. Nous sommes tous rassemblés, les vivants et les morts. Une foule consternée et anxieuse se presse dans les rues. Plus d’affaires de bourse maintenant, plus d’opérations commerciales; le marchand abandonne sa boutique, le prince son palais. Chacun est dans l’attente; chacun sent que le grand jour de l’échéance est enfin venu, et qu’il va falloir régler ses comptes pour l’éternité. Un silence solennel règne de toutes parts. Pas un son, pas une voix ne se fait entendre. Toute langue est muette, tout cœur est défaillant…. Soudain, une grande nuée blanche descend majestueusement du ciel. Sur cette nuée est assis quelqu’un semblable au Fils de l’homme. Tout œil le voit, et alors, oh! alors, de la terre qui tressaille jusqu’en ses fondements, s’élève une immense, une formidable clameur. « C’est lui! c’est lui! » répètent toutes les bouches. Mais à ce cri unanime succède bientôt un double chœur; chœur des rachetés qui chantent avec ravissement : « Alléluia, alléluia, alléluia! Gloire à toi, ô Fils de Dieu! » — et chœur de ceux qui ont méprisé Jésus, dont les sanglots et les lamentations retentissent dans les airs en notes sourdes et lugubres. Écoutez! Que disent les malheureux? Il me semble distinguer leurs paroles, à mesure qu’elles tombent de leurs bouches, graves et lentes comme les tintements d’un glas funèbre. « Rochers, tombez sur nous, disent-ils; montagnes, cachez-nous de devant la face de Celui qui est assis sur le trône! (Luc 23:30)… »
Mon auditeur inconverti, seras-tu de ceux qui pousseront ce cri de désespoir? Question saisissante et sérieuse entre toutes! Je suppose, pour un moment, que tu aies quitté la vie dans ton impénitence, et que, par conséquent, tu sois au nombre des infortunés qui salueront la venue du Seigneur par des pleurs et des grincements de dents. Oh! quelle ne sera pas alors ta terreur! Ton visage livide, tes genoux tremblants ne seront rien, comparés à l’effroi sans pareil qui remplira ton cœur, quand tu seras ivre, mais non pas de vin, quand tu chancelleras dans l’étourdissement de la peur, quand tu t’abattras dans la poussière pour cacher ton épouvante! Car le Juge est là, il approche, il avance, et maintenant l’heure du grand triage a sonné. « Rassemblez mon peuple des quatre vents des cieux, mes élus en qui mon âme prend plaisir », dit le Seigneur. Aussitôt cet ordre est exécuté. Puis on entend ces mots : « Ramassez l’ivraie, et la liez en faisceaux pour être brûlée! » Et on te ramasse, ô pécheur, et tu es lié dans le faisceau, et il ne reste plus qu’à te livrer au feu. Mais où est l’étincelle qui doit allumer le bûcher? L’ivraie doit être brûlée, mais d’où viendra la flamme qui l’embrasera? La flamme, elle jaillit de la bouche même du souverain Juge, et des mots tels que ceux-ci la composent : Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel, préparé au diable et à ses anges! (Matthieu 15) Hésites-tu, ô pécheur? «Allez! » répète ton Juge.
— Implores-tu sa bénédiction? « Tu es maudit ! »
— Veux-tu fuir? « Le feu éternel est devant toi ! »
— Demandes-tu grâce?
« Le temps de grâce est passé, répond Christ. Parce que j’ai crié et que vous avez refusé d’ouïr; parce que j’ai étendu ma main, et qu’il n’y a eu personne qui y prît garde; aussi je me rirai de votre calamité, je me moquerai quand votre effroi surviendra! (Proverbes 1:24,26) Allez, vous dis-je, au feu qui ne s’éteint point! » — et tu y vas!…. Et quelles sont les pensées qui assiègent ton cœur? « Oh! plût à Dieu que je ne fusse jamais né! t’écries-tu avec désespoir; plût à Dieu que l’Évangile ne m’eût jamais été annoncé, car je n’aurais pas commis le crime de le rejeter! » Ah! c’est alors, pécheur, que tu sentiras au fond de ta conscience la morsure du ver qui ne meurt point. « Je connaissais le bien, diras-tu, mais j’ai fait le mal. J’ai semé le vent, il est juste que je moissonne la tempête. Dieu a mis des entraves sur ma route, mais j’ai passé outre; il m’a appelé, mais j’ai fermé mon oreille; il m’a supplié, mais j’ai repoussé ses avances miséricordieuses. Oh! pensée de toutes les pensées la plus poignante et la plus amère! J’ai été le meurtrier de mon âme! Je suis perdu, perdu, perdu, et perdu par ma propre faute! J’ai repoussé l’Évangile de Christ, je suis l’artisan de mon éternelle ruine!
En sera-t-il ainsi de toi , mon cher auditeur, en sera-t-il ainsi de toi? À Dieu ne plaise! Oh! puisse le Saint-Esprit t’attirer irrésistiblement vers Jésus, car tu es trop vil pour céder, je le sais, à moins qu’une force divine ne t’y contraigne. Toutefois, j’espère pour toi, mon frère. N’entends-je pas ta voix murmurer en cet instant même : Que faut-il que je fasse pour être sauvé? Je vais te le dire, pauvre âme : crois au Seigneur Jésus-Christ et tu seras sauvé. Il n’y a pas d’autre moyen de salut que la foi en Christ. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé; mais celui qui ne croira point sera condamné : tel est l’enseignement de l’Écriture. Oh! pécheurs, regardez donc à Jésus! Voyez : Il est là, suspendu à la croix, il souffre et il meurt pour vous… Regardez à lui et vous vivrez.
« Nul ne peut rendre Dieu propice
Que Jésus-Christ le Rédempteur;
Son sang offert en sacrifice ,
Voilà la rançon du pécheur![2] »
Fussiez-vous même les plus vils, les plus souillés, les plus dégradés des hommes, venez, venez à Christ. Fussiez-vous l’écume, le rebut, les balayures de la société, Jésus vous invite à venir à lui. Il n’est pas jusqu’aux âmes dont Satan ne veut plus, que mon Sauveur ne soit prêt à recevoir. Oh! venez donc à lui, qui que vous soyez, tels que vous êtes, et vous obtiendrez miséricorde! Mais si vous endurcissez vos cœurs, tremblez! Oui, je vous le dis, tremblez!
« Car Dieu, de sa gloire jaloux,
Dira, dans son juste courroux :
« J’ai cette parole jurée,
Que jamais ce peuple endurci,
Puisqu’il me résistait ainsi,
Dans mon repos n’aurait entrée! » (Psaumes 95:10-11)
FIN.
[1] Lire : le musulman (note de l’éditeur).
[2] Chants chrétiens.
Traduit et publié par « La Société des Livres Religieux, Toulouse, 1860, Réédité par Danny Therrien et Hugo Lacasse